« Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien » : pour Socrate douter c’est remettre en cause tout ce qui se présente comme un savoir définitif. Douter de toute chose pour avancer. Des fois beaucoup, d’autres fois moins. Sans le savoir au préalable nous avons nous aussi remis en cause nos certitudes.
Pour les plus renseignés, vous aurez du mal à me croire, mais j’avais planifié les choses à l’avance… Nous avions un plan. Un peu comme Christophe Colomb quand il est parti trouver une route plus rapide ralliant l’Europe à L’Inde… pour finalement advenir sur une plus grosse découverte ! Si je nous souhaite la même chose au final, de notre côté le plan était très simple sur le papier : « kiffer » (pour les plus vieux adorer) nos milliers de km de routes et nos nuits dans notre Holden Commodore et trouver très vite du boulot dans la récolte de fruit pour renflouer nos porte-monnaie. Un plan qui a très vite vacillé sous quelques rafales d’obstacles.
Cela fait maintenant 10 jours que nous arpentons les larges routes d’Australie et ses petites villes de l’Est (Young, Griffith, Leeton, Mildura…). Si la route est excitante, ces petites villes commencent à avoir un petit côté redondant. L’impression de revenir indéfiniment sur nos pas. Un côté lancinant qui peut aussi s’expliquer par notre petit rituel : nuit dans des campings, réveil dans notre voiture à 10h, petite douche d’eau chaude, recharge de nos appareils électroniques, repas dans un fast food, départ en début d’après-midi, route pendant 400 km, plein à faire, et arrêt dans la prochaine ville. Un refrain qui commençait à sonner faux, surtout avec nos recherches infructueuses concernant la récolte de fruit. Toujours la même réponse : « nous avons du travail, mais pas avant fin octobre début novembre ».
C’est là que le doute a commencé à s’installer. Et si nous avions pris la mauvaise décision ? Nous fallait-il vraiment un véhicule ? Pourquoi ne pas être resté à Sydney qui nous avait ouvert Ses bras ? Combien de temps allons-nous durer comme ça ? La solitude ne prendra telle pas le dessus sur notre bonne humeur ? Ces questions nous ont obligées à revoir notre plan. Fini toutes les petites villes à visiter dans le New South Wales pour commencer le « fruitpicking », la récolte de fruit ce n’est pas pour tout de suite !
Que faire en attendant pour occuper notre quotidien ? Partir à Perth à 4000 km pour découvrir une ville qu’on qualifie d’agréable ? Trop loin, trop couteux. Rester dans nos petites villes ? Trop ennuyant. Partir en Tasmanie ? Pourquoi pas ! Nous sommes à 500 km de Melbourne et nous pourrons ensuite prendre un ferry pour nous mener sur cette belle île sauvage. Au moment de cette décision, comme pour Colomb, notre trajectoire prend un autre virage. « L’élément perturbateur » de ce virement ? Un membre de ma famille : ma grand-mère. Je reçois un texto pour me dire que nous pourrions passer un petit bonjour à une connaissance qui habite à Bendigo. Heureuse coïncidence, Bendigo est sur notre chemin : allons faire un tour !
Il s’avérera que ce contact avec la famille Stanmore sera une vraie bouffée d’oxygène. Famille des plus accueillante, qui sans nous connaître va nous considérer pendant les 3 jours à ses côtés comme sa propre famille. L’occasion pour d’enfin parler la langue de « Patrick White (Ancien prix Nobel de littérature Australienne) ». Logés et nourris gracieusement, avec en plus, deux jours de boulot rémunérés à la clé ! Autant dire que nous repartons le ventre plein de cette escapade chez ce charmant couple sexagénaire amoureux de la France.
Rendez-vous en Tasmanie ? Eh bien non ! Encore une fois nous devons changer de cap. Pas de place pour les deux prochaines semaines pour une voiture ! Où allons-nous ? À 100 km de Melbourne, nous décidons très rapidement d’être attirés par les sirènes de la deuxième plus grande ville du 6ème plus grand pays du monde !
Voilà où nous en sommes aujourd’hui, sans savoir où nous serons demain. Nous naviguons dans un grand brouillard qui nous attire irrémédiablement vers lui. No worry (Pas de souci) ! De toute façon ce brouillard est bien plus agréable à vivre que le quotidien d’une journée monotone. Le doute et la remise en cause nous permettent de traverser cette brume étape par étape, jour par jour vers de nouvelles aventures. La seule chose dont je suis sur : c’est que je ne suis sur de rien !